Nick les regardait et se
demandait comment deux personnes de tailles aussi différentes pouvaient s’accommoder
au lit. Ils doivent y arriver quand même, pensa-t-il en souriant intérieurement.
En tout cas, ils ont l’air de s’entendre. Et de toute façon, ce ne sont pas mes
affaires.
– Tu es tout rouge. Tu as de
la fièvre ?
– Non… bon, peut-être un peu.
– Alors, tu ne sors pas ce
soir. Tu m’entends ?
– Ma chérie, j’ai des
pensionnaires. Ils n’ont peut-être pas particulièrement besoin d’être
surveillés, mais il faut quand même leur donner à manger et à boire.
– Nick peut s’en charger, dit-elle
d’une voix décidée. Va te coucher. Et essaye d’oublier tes insomnies.
– Nick ne peut pas y aller
répondit-il mollement. Il est sourd-muet. Et en plus il ne travaille pas pour
la police.
– Tu n’as qu’à le prendre
comme adjoint.
– Mais il n’est pas d’ici !
– Tout le monde s’en fiche
dit Jane Baker d’un ton qui ne souffrait pas de réplique. Allez, John, fais ce
que je te dis.
Elle se leva et commença à
débarrasser la table.
C’est ainsi que Nick Andros, prisonnier
du shérif de Shoyo, devenait son adjoint moins de vingt-quatre heures plus tard.
Alors qu’il s’apprêtait à se rendre au bureau du shérif, Baker revint dans le
salon, attifé d’une robe de chambre usée jusqu’à la corde qui lui donnait l’air
d’un fantôme. Il avait l’air embarrassé d’être vu dans cette tenue.
– J’aurais jamais dû me
laisser faire, dit-il. Mais je me sens vraiment mal foutu. J’ai la poitrine
complètement prise et j’ai l’impression de brûler comme un fourneau. Sans
parler des jambes, en coton.
Nick fit un geste de sympathie.
– Mon adjoint est parti. Bradley
Caide et sa femme sont allés s’installer à Little Rock quand leur bébé est mort.
Mort dans son berceau. Une histoire horrible. Je les comprends.
Nick pointa le pouce vers sa poitrine.
– T’en fais pas, mon gars, tout
ira bien. Mais tu fais attention quand même. Il y a un 45 dans le troisième
tiroir de mon bureau. Ne le prends pas avec toi quand tu vas dans le bloc des
cellules. Et laisse aussi les clés dans le bureau. Compris ?
Nick fit signe que oui.
– Si tu dois y aller, garde
tes distances. S’il y en a un qui joue les malades, ne tombe pas dans le
panneau. C’est le plus vieux truc du monde. De toute façon, si un type est
vraiment malade, le docteur Soames pourra passer le voir demain matin. Je serai
là.
Nick sortit le bloc-notes de sa
poche et se mit à écrire :
– Merci de me faire
confiance. Merci de les avoir bouclés.